LE PORTRAIT A LA RÉUNION AU XIXe SIÈCLE

     

Antoine Émile Grimaud, Portraits de notables, vers 1830-1840

La vogue des portraits à La Réunion

À La Réunion, la démocratisation du portrait peint durant la première moitié du XIXe siècle s’opère également. Les artistes répondent aux commandes des clients aisés pour lesquels il est de bon ton d’avoir, dans son salon, des portraits de famille et ainsi laisser à la postérité l’image de leur réussite.

Ainsi, la bourgeoisie locale reproduit le modèle de la bourgeoisie européenne comme l’illustrent plusieurs portraits de notables créoles dans les collections du musée Léon-Dierx. Propriétaires terriens, avocats, médecins, militaires, commerçants montrent leur statut social et leur aisance financière. La composition, les postures, les accessoires sont autant d’indices qui dévoilent le personnage qui se présente sous ses plus beaux atours.

Jean-Auguste Poussin, Portrait du botaniste Joseph Hubert, vers 1830

Les artistes de renom 

Durant la première moitié du XIXe siècle, le milieu artistique local compte plusieurs artistes ayant une certaine renommée. Jean-Auguste Poussin ou Alphonse Garreau sont les plus connus, formés à Paris dans les ateliers des grands peintres néoclassiques Jacques Louis David et Antoine Gros. 

Une autre artiste, Adèle Ferrand, arrivée dans l’île en 1846 et épouse de Denis-André Le Coat de Kervéguen, réalise dans un cadre strictement privé des portraits des membres de sa famille. Sa disparition prématurée deux ans après son arrivée dans l’île lui laisse peu de temps pour constituer une véritable production « réunionnaise » hormis les quelques portraits de sa belle-famille.  

À Saint-Denis, tous ceux qui dans l'île ont quelque notoriété veulent avoir leur portrait exécuté par Antoine Louis Roussin : ce jeune artiste s'est rendu vite célèbre « pour la facilité avec laquelle il saisit la ressemblance ». 

À Saint-Paul, Arthur et Émile Grimaud, sont les artistes créoles très connus de Bourbon au milieu du XIXe siècle : le premier pour ses portraits, le second pour ses caricatures féroces de la société coloniale. 

   

Antoine Émile Grimaud, Denis de Kervéguen, 2e quart 19e siècle (à gauche)

Alphonse Garreau, Portrait d'homme, 1836

Antoine Louis Roussin, Portrait de Mme Lahuppe, 1885

La fin du portrait peint

Des années 1800 aux années 1880, ces peintres ont laissé une production importante, dont quelques exemples se trouvent au musée. La plupart de ces portraits sont en buste sur un fond neutre ; ils ont un aspect lisse, porcelaineux, reflets de l’esthétique académique de cette période. 

Néanmoins, certains se distinguent par leur « originalité », tel le Portrait d’un colon de l’île Bourbon d’Arthur Grimaud dans lequel sont repris, un peu naïvement, les codes du portrait de la noblesse d’Ancien Régime : la pose du personnage, le rideau, les éléments d’architecture, les accessoires symboliques. 

À La Réunion comme en Europe, avec l’invention de la photographie, le portrait photographique connaît un essor sans précédent qui vient concurrencer le portrait peint. Les longs temps de pose dans l’atelier de l’artiste sont remplacés par quelques minutes chez un photographe. Ainsi, moins coûteuse, la photographie met un terme à la pratique du portrait peint à La Réunion au cours de la seconde moitié du XIXe siècle.

 

Arthur Grimaud, Portrait d'un colon de l'île Bourbon, 1848