LE PORTRAIT AU XIXe SIÈCLE

Adèle Ferrand, Portrait d'Augustine Bernard (soeur d'Adèle), 1839

Ressemblance et vraisemblance

Le portrait c’est d’abord la représentation la plus fidèle possible d’un individu. Le critère de ressemblance physique est important mais dans le portrait s’exprime aussi le caractère, la psychologie et l’appartenance sociale du modèle. Le commanditaire qui passe un contrat avec l’artiste doit se « reconnaître » dans son portrait et le spectateur doit « le » reconnaître. Il s’agit non seulement de critères de ressemblance mais également de vraisemblance. 

Pour un portrait réaliste, le modèle a le choix du format, de la pose, du costume et du décor : neutre, dans un intérieur ou dans la nature. Les femmes, plus souvent que les hommes, aiment, selon la mode, avoir un visage idéalisé, une pose convenable donc finalement stéréotypée. Les portraits d’enfants, à l’époque où nombre d’entre eux n’ont pas le temps de vieillir, sont toujours charmants et marquent l’attachement de leurs parents. Pour les hommes, la nécessité d’affirmer leur statut social et d’être identifié comme tel, les conduit à poser avec les attributs de leur fonction ou de leur activité favorite.  

Au XIXe siècle, les portraits prolifèrent. Ils ne sont pas tous des chefs d’œuvre, mais ils répondent à deux exigences : d’une part celle des commanditaires, en particulier les membres de la nouvelle bourgeoisie d’affaires qui souhaite affirmer son existence et ses valeurs ; d’autre part la nécessité dans laquelle se trouvent les artistes de gagner leur vie. Le portrait, de format raisonnable, est une source de revenus plus aisée que la peinture d’histoire.

Jean-Auguste Poussin, Autoportrait, vers 1830

Dans la tradition d’Ingres

Deux conceptions du portrait s’opposent alors, celle des « coloristes » romantiques comme Delacroix qui expriment avec poésie et imagination le caractère du modèle ; l’autre, celle des « dessinateurs » comme Ingres et ses nombreux élèves qui cherchent à rendre le plus fidèlement possible l’ensemble et les détails particuliers qui caractérisent le modèle. L’école d’Ingres a sans doute produit le plus grand nombre de portraitistes remarquables.

Le développement de la photographie a permis, à partir du milieu du XIXe siècle, d’obtenir à moindre coût des portraits parfaitement ressemblants. Cette innovation permet aux peintres, à partir des impressionnistes, de traiter les portraits, plus comme un morceau de peinture que comme un exercice de vraisemblance. Notons que presque tous les peintres ont peint leur autoportrait.

La grande nouveauté de la mode masculine au XIXe siècle, est l’austère habit noir que portent tous les hommes de la bourgeoisie, quelle que soit leur profession ou leur fonction sociale. L’élégance se mesure à la coupe du costume, à la blancheur de la chemise et à la discrète fantaisie de la cravate nouée. Pour le peintre, le visage et les mains restent le lieu des virtuosités. Quant aux femmes, à qui la société demande principalement d’être belles et bien sûr bonnes mères, elles se font peindre dans des robes aux tissus raffinés, noir, blanc ou parfois colorés, agrémentés de quelque dentelle ; elles dénudent leurs épaules lorsqu’elles sont jeunes ; elles se parent de bijoux, mais elles font tout cela avec discrétion, bon goût en quelque sorte. La société bourgeoise n’affiche jamais son luxe avec trop d’ostentation. Le peintre doit savoir traduire le caractère physique de son modèle mais surtout l’image sociale que la bourgeoisie veut bien donner d’elle-même.