LES CHEFS-D'OEUVRE DU MUSÉE : Maurice Denis

Maurice DENIS 

Grandville, 25 novembre 1870 – Saint-Germain-en-Laye, 13 novembre 1943

 

Durant ses études au Lycée Condorcet puis à l’Académie Julian et à l’École des beaux-arts, Maurice Denis se lie d’amitié avec Vuillard, Ker-Xavier Roussel, Bonnard, Sérusier et Ranson, artistes avec qui, plus tard, il forme le groupe des Nabis (Prophètes en hébreu). A peine âgé de 20 ans, il en devient le théoricien. 

 Fervent catholique, sa profonde spiritualité lui confère le surnom de « Nabi aux belles icônes ». Denis, peintres de nombreuses scènes religieuses est aussi peintre de scènes intimes, prenant souvent pour modèle sa femme Marthe Meunier, épousée en 1893. 

Sa peinture se caractérise par une stylisation et une simplification des formes, et des rapports de couleurs très contrastés. Il résume ainsi sa devise dans une phrase restée célèbre et publiée dans la revue Art et critique : « Se rappeler qu’un tableau […] est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées. » Cette pensée est à l’origine de toute la réflexion artistique du XXe siècle.

Femmes dans un parc ou Les Muses (esquisse), Maurice DENIS

Vers 1893
Huile sur toile
53,5 x 33,5 cm
Inv 1947.01.35
Don Lucien Vollard

En 1893, Maurice Denis expose au Salon des Indépendants à Paris un grand tableau (1,71 x 1,37 m), intitulé Les Muses, qualifié par l’artiste de « panneau décoratif », œuvre aujourd’hui conservée au musée d’Orsay. Le tableau du musée Léon-Dierx en est l’esquisse assez aboutie. 

Les Muses prennent les traits de Marthe, l'épouse de l'artiste, figure démultipliée, que Denis peint vêtue à la mode de son temps. La scène se passe dans le sous-bois du parc qui se trouve non loin du château de Saint-Germain-en-Laye, ville où l’artiste possède une maison et où il a installé son atelier.  

Les arabesques des branches et des robes, lignes courbes évoquant l’Art Nouveau, s’opposent à la rectitude des troncs. Les formes sont cernées, simplifiées et peintes dans des tons d’automne, plus chauds et affirmés ici dans l’esquisse que dans le « panneau décoratif » final. 

Le nombre de jeunes femmes – ici plus d’une douzaine et dix dans le grand tableau – permet de penser qu’il ne s’agit pas d’une représentation traditionnelle des neuf muses mais plutôt d’une évocation de sa propre muse inspiratrice, omniprésente et omnipotente dans ce «  Bois sacré », rappel du lieu idéal et intemporel des arts peint par Puvis de Chavannes dans la monumentale décoration de l’escalier du musée des beaux-arts de Lyon, sujet traité ensuite plusieurs fois par Maurice Denis lui-même.

Remarquable par la stylisation des formes, la simplification des personnages et des arbres, les cernes vigoureux enserrant les figures des muses et ses couleurs vives éminemment décoratives, ce tableau rappelle l’importance de Paul Gauguin dans la formation artistique de Maurice Denis, et l’héritage de du synthétisme de l’École de Pont-Aven dans la production des Nabis.

Pierre Puvis de Chavannes, Muses porteuses de lyres, vers 1893-1896